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Banksy, le chevalier blanc du Street art 

Florence Aubin-Groshens |
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Banksy :

Banksy vient de refaire parler de lui avec la création de  5 de ses œuvres , en août dernier,  à Londres.   Ce sont des œuvres mettant en avant des animaux - un rhinocéros montant sur une voiture réelle,  un chat s'étirant,  une silhouette de loup peint sur une parabole se transformant en lune,  deux pélicans sur  le mur d'une échoppe - destiné  "à divertir les Londoniens".


A Paris, des admirateurs du street-artiste anglais ont créé un musée qui lui est dédié (44 rue du Faubourg Montmartre).

Non reconnu par l'artiste, cet espace a le mérite de rassembler ses œuvres éparpillées en Grande-Bretagne, France, Israël, Palestine, Ukraine, partout où il est intervenu pour défendre des causes perdues : les loosers, les enfants  et les femmes en difficulté, les homosexuels, les ouvriers, les migrants,  la guerre en Ukraine, le conflit israëlo-palestinien, la corruption, tout y passe !


Ce chevalier blanc de l'art, pacifiste, alerte l'opinion publique, avec des dessins réalisés avec beaucoup de finesse et de poésie et  un humour décalé qui dénonce et interpelle la violence du temps. Les coquets hélicoptères de guerre, avec leur nœud papillon rose, cadeau de Tony Blair aux américains lors de la guerre en Irak, font rire dans les chaumières !  Le soldat juif en position de combat envoyant un bouquet de fleurs comme on envoie une grenade, une petite fille fouillant soigneusement les poches d'un soldat ainsi que celle embrassant une bombe interrogent la brutalité des conflits.

Ou encore, les rats rebelles, métaphore d'une certaine condition humaine, les ailes des alcooliques déchus  du métro londonien  devenus anges perdus sur terre,

le baiser d'un couple de policier homosexuel, font réfléchir sur nos préjugés...


Banksy est un phénomène artistique, culturelle, et économique. Mais,  avant tout, il est une énigme.

Son identité est inconnue ! A l'exception de son équipe et de ses proches, nul ne connait son visage. Aucune photo ne circule !  En bon street-artiste de base des années Thatcher 

- la répression  de l'opération Andersen de la semaine de la terreur (Week of the Terror)  du 24 au 30 juillet 1989 a envoyé en prison quelques dizaines de street-artistes - , il dessine masqué pour éviter d'être reconnu  par les caméras de surveillance.  Car le Street art, à l'origine, est illégal puisqu'assimilé à du vandalisme. 


Cet anonymat durable - un exploit, assez mystérieux à l'ère du portable - nourrit une légende qui n'en finit pas de surprendre. 


Phénomène artistique : Banksy,  a su donner au Street art ses lettres de noblesse.  Le Street art s'empare  de l'espace en un geste poétique et politique. Il s'agit de rendre aux citoyens "son" espace vampirisé par les enseignes industrielles et commerciales. Le Street art bouscule les codes et les circuits du marché de l'art ou et des institutions culturelles. L'art n'est plus réservé à une élite ou à des institutions ! Il devient accessibles à tou.te.s. Cet acte de liberté est le moteur essentiel de Banksy.


Phénomène économique :  les fresques de rues de Banksy sont autant de pieds de nez au marché de l'art qui l'a dédaigné,  puisque leur cote  s'envolent les plaçant parmi les œuvres les plus chères du monde.  L'esprit critique de Banksy et la simplicité des dessins plaisent !


Son oeuvre dont le prix atteint des sommets est "Love is the bin" (L'Amour est dans la poubelle). Cette oeuvre, proposée en 2018  à un million d'euros lors d'une vente aux enchères chez Sotheby's, fut découpée en lanières par un dispositif mécanique conçu par Banksy dès la conclusion de  la vente. Remise sur le marché en 2023 son prix s'envole pour atteindre 

18 895 584 €.

  • Le prix moyen d’un tableau de Banksy est de 1 195 800 €
  • L’huile sur toile “Game Changer” (2020)  est partie à 16 719 897 euros tandis que “Sunflowers from Petrol Station” (2005) a trouvé preneur pour 10 697 666 euros.
  • Le Parliament - représentant les membres du parlement anglais en chimpanzé -  atteint les 11 millions d'euros vendue chez Sotheby's, le jour du Brexit le jeudi 3 octobre 2019.

D'où  l'apparition d'une incongruité économique. Les dessins de rue de cet illustre anonyme  sont souvent volés  pour réapparaitre dans des prestigieuses ventes aux enchères  à des prix qui défient toute concurrence. Et Banksy, un des artistes les plus chers de son temps, ne reçoit rien de ces ventes !

A contrario, Il n'est pas rare que  lorsqu'une  vente est du ressort de l'artiste, Banksy reverse les résultats de ses ventes à des causes qui lui tiennent à coeur. Les bénéfices d'une vente chez Christie's  (Game Changer (2020)) avaient été reversés au National Health Service du Royaume Uni en 2021.


Mais alors, de quoi vit Banksy  ?  De la vente de son livre, de ses estampes,  de ses lithographies, et d'événements artistiques. 


Phénomène juridique :

 Outre les questions juridiques que soulève le Street Art - A qui appartiennent les fresques de rue ? A leur auteur, en fonction du droit moral ou au propriétaire des murs  ?  - se pose ici une nouvelle question : Comment le droit d'auteur peut-il s'appliquer à un homme   à l'identité inconnu et qui revendique ses oeuvres uniquement par un surnom ? 


Banksy  n'est pas  "rien" : C'est à la fois une désignation, une signature ( même si peu d'oeuvres portent sa signature), et une marque  déposée. Mais l'identité restant inconnu, le droit d'auteur peut ne pas s'appliquer. Ainsi, dans le procès en diffamation qui l'opposa à la société Full Black colour, qui avait reproduit ses dessins sur des cartes postales, sans son autorisation, l'argument de la nécessaire protection de la marque Banksy fut considéré de mauvaise foi et il perdit son procès.


i Banksy ne signe pas ses œuvres,  il a désigné le le bureau Pest Control, pour authentifier ses oeuvres ainsi que son site instagram qu'il utilise pour identifier chacune de ses créations. https://banksyexplained.com


Ce qui permet de clarifier le marché, évitant la circulation de faux Banksy. 


Banksy  pose ses règles. Ainsi il accepte les reproductions de ses oeuvres à des fins humanitaires et non pour un but commercial. 


Enfin, dénonçant la "censure" du musée institutionnel qui sélectionne les oeuvres, Il s'est réapproprié l'espace muséal  institutionnel en réalisant des accrochages sauvages dans de grands musées nationaux. 

L'art doit  être libre, la seule contrainte de l'artiste est sa propre audace ! Plus de commanditaire, plus de mécène. L'artiste est en contact direct avec le public !


C'est bien la qualité esthétique et poétique  au service de messages antimilitariste, anticapitaliste, antisystème,  défendant les migrants,  les femmes, les homosexuels, les enfants, la paix dans le monde etc... qui en fait son succès. Banksi, à l'échelle des valeurs humaines,  "remet l'église au milieu du village" .

Son extrême liberté lui a permis  de dominer autant le marché de l'art que celui des média dont il  réussit à troubler les lignes réussissant , grâce à son anonymat, le pari  fou que l'attention se porte  uniquement sur ses oeuvres et non sur sa vie privée. Un nouvel exploit !




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Florence Aubin-GroshensGuide-conférencière

Après plus de 20 ans passées à la BnF, j'ai décidé de créer Flo's Arts, une petite société de visites guidées et de conférences culturelles. Elle s'adresse à tous les amateurs d'art, au public familial, sensible à l'art, sous toutes ses formes.

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